Depuis des milliers d’années, la côte nord-ouest du Canada et une partie des Etats-Unis est le territoire privilégié des Premières Nations, dont on nommait encore récemment les habitants, les indiens, alors qu’aujourd’hui on préfère recourir à d’autres termes, comme, natifs, peuple indigène ou aborigènes. Cette partie de territoire est en outre délimitée par l’Océan Pacifique à l’ouest, les hautes montagnes à l’est et s’étend de l’Alaska jusqu’au nord de la Californie. Ce vaste territoire bénéficie des richesses abondantes de l’océan et d’un climat relativement tempéré. Le saumon en profusion et autres produits de la mer, ainsi qu’une nature généreuse, aux arbres géants comme le cèdre en particulier, ont permis aux habitants de trouver tout ce dont ils avaient besoin pour se nourrir, se vêtir, fabriquer canoës, outils, ustensiles, masques de cérémonie, totems et autres objets. Les gens vivaient ainsi au gré du cycle de la nature, chassant, pêchant et récoltant selon les saisons. Durant l’hiver, ils trouvaient également le temps de développer une vie culturelle et artistique très riche. Les moments importants et autres événements étaient marqués par les « potlatch » cérémonies festives à l’issue desquelles chaque personne recevait un présent, dont l’importance dépendait du récipiendaire.
Les natifs ont toujours été organisés en unités politiques indépendantes, dirigées par un conseil, dont les membres étaient élus. Elles comprenaient un ou plusieurs villages. Ces différents groupes sont appelés « Nation » au Canada et « Tribu » aux Etats-Unis. Ils diffèrent également par la langue, le genre de bateaux, les styles de sculpture, les rituels ou autres aspects culturels. Avant l’arrivée des européens les familles vivaient ensemble dans une grande maison commune en cèdre. Chaque bâtiment pouvait regrouper 40 à 60 personnes, dont la plupart partaient, en été, chasser, pêcher et récolter. Chaque maison avait ses propres histoires orales et coutumes. Les tâches étaient réparties entre les hommes et les femmes, les premiers étant plus désignés pour la sculpture et les objets peints, dont les fameux mats totems, les femmes pour confectionner les vêtements, chaussures et divers parements. Les compétences artistiques étaient alors considérées comme un grand privilège. Les nombreuses histoires et légendes se transmettaient en outre de génération en génération.
Actuellement les natifs vivent comme la plupart des habitants de la région. Cependant cette assimilation ne s’est pas déroulée sans drames. Au 18ème siècle, avec l’arrivée des européens, on estime que le 90% de la population aborigène a été décimée par les épidémies, les maladies sexuellement transmissibles, l’alcoolisme et le désespoir. La plupart des villages furent alors désertés, leurs maisons et totems laissés à l’abandon. Les Premières Nations tombèrent aussi sous l’influence des missionnaires et premiers gouvernements, qui ont exercé une pression considérable pour obtenir une assimilation totale. C’est ainsi que la cérémonie des « potlatch » fut interdite, (de 1884 à 1957 !), les masques confisqués, certains chefs et danseurs emprisonnés. Plusieurs générations d’enfants furent enlevés à leur famille pour être placés dans des écoles conduites par les blancs. Ils grandirent oubliant ainsi leur langue et culture. Et ce n’est qu’en 1949 que les natifs eurent le droit de vote en Colombie Britannique et en 1960, sur le plan fédéral. Quant à la question cruciale des territoires, qui avaient tout simplement été annexés par les nouveaux arrivants, c’est seulement en 1990 que la Province, en accord avec le gouvernement fédéral, accepta d’aborder cette question et négocier avec plusieurs groupes de natifs l’octroi de privilèges sur certaine portions de territoires pour y vivre et s’organiser de manière relativement indépendante. Le premier traité moderne fut signé avec la Nation Nisga’a, en 1999 ! A ce jour la Colombie Britannique compte 197 Premières Nations.
Aujourd’hui approximativement 156'000 natifs vivent en Colombie Britannique, soit le 4% seulement de la population de la Province. La plupart sont encore très attachés au pays de leurs ancêtres, même s’ils vivent dans les villes et cités. Le quart seulement des natifs vit dans les réserves. Malgré presque deux siècles d’assimilation les croyances et traditions ont cependant survécues et nombre de Premières Nations ont négocié et obtenu d’avoir leur propre gouvernement, permettant ainsi aux enfants et adultes d’apprendre leur langue, culture et prendre part aux cérémonies. Ces communautés ont également repris la sculpture ainsi que la construction des grands canoës traditionnels et l’érection des fameux mats totems que l’on retrouve à Stanley-Parc et qui reflètent le renouveau et l’intérêt pour la culture des Premières Nations (en lien le site de l'Assemblée des Premières Nations).
Il m'a semblé nécessaire de faire cette brève introduction avant d'aborder le sujet des totems qui fera l'objet d'un prochain article. A suivre.....
Les Premières Nations aujourd'hui Emily Carr -Totem Poles (1912)