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15 avril 2009 3 15 /04 /avril /2009 22:32


Toujours attiré par cette région magique de tous les défis, me voici donc de retour dans le Gd Nord pour la troisième fois. Parti de Genève le 14 mars, je me suis d’abord rendu à Montréal, avec ma sœur Christiane, pour rencontrer des amis et visiter un peu la ville. Après une journée et un repas mémorables à l’érablière Charbonneau et deux contacts pour mon projet, nous avons pris le train le 19 pour joindre, en quatre jours, Toronto à Vancouver. Quel plaisir de retrouver cette dernière ville et de la faire visiter aussi aisément que je le ferai pour Genève.

Puis le 27 je me suis envolé pour Inuvik, dans les Territoires du Nord (NWT), pour retrouver nos amis Judi et Olav, avec qui nous avions, l’an dernier Geneviève et moi, réalisé à la même période une expédition en chiens de traineaux d’Inuvik à Tuktoyaktuk, (voir articles précédents du blog). Le temps de m’acclimater à une température qui oscillait entre -35 et -15 degrés la journée et diverses démarches sur place, je me suis embarqué le 30 dans un petit avion pour joindre, non sans une certaine appréhension, ne sachant pas ce qui m’attendait, l’île de Banks, distante de 523 km au NE d’Inuvik, dans l’archipel arctique de l’ouest canadien.

Le vol qui dure deux bonnes heures m’a permis d’observer le phénomène de ces long couloirs d’eau non recouverts par les glaces (open water) en pleine mer de Beaufort, qui, par l’effet albédo, présentent une surface sombre aux rayonnements solaires, absorbant ainsi la chaleur, qui contribue à accélérer la fonte de la glace de chaque côté du couloir. Ce phénomène serait dû, d’après les explications qui m’ont été fournies par un spécialiste, à un régime de vents d’est, plus chauds, qui favorisent l’apparition de ces couloirs, alors qu’avec des vents d’ouest, ils se refermeraient.

L’île représente approximativement un peu moins de 2 fois la superficie de la Suisse, comprenant le parc national d’Aulavik, qui reçoit chaque année une vingtaine de visiteurs à peine. Nous atterrissons à Sachs Harbour, la seule localité de cette île qui compte seulement 150 habitants ! Jackie Kuptana, chez qui je vais habiter jusqu’au 2 avril, est là pour m’accueillir et me conduire dans le lodge qu’elle tient avec son époux. C’est un des très rares endroits de l’île qui héberge des visiteurs ou autres personnes ayant à faire à Sachs et il faut venir du continent avec ses subsistances, car seul le breakfast est assuré. La grande majorité de la population est inuit, Jackie est quant à elle originaire d’Afrique du Sud. Après m’être installé, je fais connaissance de Trévor Lucas, guide inuit, qui va m’emmener le lendemain à la découverte des muskoks, ces animaux qui remontent à la préhistoire. Nous discutons des conditions et nous donnons rendez-vous pour le lendemain à 10 heures. Nous partons ainsi en moto neige et parcourons environ 5 miles pour déboucher dans une vaste prairie immaculée où nous apercevons au loin quelques petites taches noirs. Le guide me dit alors d’attendre à cet endroit, pendant qu’il va rabattre avec sa moto neige une petite partie du troupeau sur moi, le plaçant entre nos deux engins, prêts au départ et vers lesquels nous demeurons par sécurité. Le moment est absolument magique de voir arriver ces animaux, que je m’apprête à photographier et filmer. Pas évident avec une température qui doit bien être inférieure à -30 degrés, ce d’autant plus que j’ai oublié de mettre les chaufferettes dans mes sous gants. Nous demeurons en observation durant une bonne demi-heure. Je suis très ému car j’ai toujours rêvé de pouvoir contempler ces animaux dans leur milieu naturel, qui constituent d’ailleurs la plus grande réserve au monde, plus de cinquante mille.

Ceux que nous contemplons se sont mis en cercle, épaule contre épaule pour faire face à l’ennemi et charger en cas de nécessité, ce qui constitue une position défensive suicidaire lorsqu’ils se trouvent devant des hommes armés. Au retour Trévor me montre l’endroit où ils tuent ces animaux, après les y avoir dirigés pour en récupérer la viande, la peau et la fameuse laine qui est utilisée pour faire des gants et autres vêtements qui sont vendus une fortune à New-York. Ils doivent en effet en supprimer six mille par an, selon les directives gouvernementales, car ils font énormément de dégâts sur l’île. L’année passée ils en ont tué seulement quatre mille Nous nous dirigeons ensuite vers sa maison en passant par la mer de Beaufort. Je fais connaissance de son neveu qui accepte de se faire photographier et filmer avec un magnifique sourire.

La faune de cette île est aussi particulièrement riche en caribous de Perry, loups, renards blancs de l’arctique, ours polaires, phoques, qui demeurent assez loin, ainsi que de nombreux oiseaux comme les lagopèdes, qui changent de couleur selon les saisons et les oies des neiges, qui viennent pondre leurs œufs à fin mai et dont la plupart seront détruits par les tempêtes, cependant comme cette espèce vit entre 26 à 30 ans, elles ont tout de même des chances de se reproduire.

Je souhaite également aborder brièvement un sujet, qui en Europe semble avoir complètement été détourné de l’essentiel. Il s’agit notamment de la protection des ours polaires, dans les territoires arctiques. Pour les inuit, il est en effet essentiel de pouvoir en poursuivre la chasse, comme pour d’autres espèces, selon les quotas qui leur sont attribués, car il s’agit d’une source essentielle pour leur survie dans ces régions, puisqu’ils ne peuvent rien retirer du sol. Par ailleurs lorsqu’ils pratiquent cette activité, comme d’autres, ils sont aussi les observateurs privilégiés du milieu naturel et participent de manière déterminante à la protection de cet environnement exceptionnel qu’ils connaissent mieux que quiconque. De plus ils occupent et possèdent en communauté des territoires, qui, s’ils en étaient absents, seraient alors certainement convoités par des personnes étrangères, uniquement motivées par d’autres préoccupations géo stratégiques, ainsi que l’exploitation des minerais ou autres énergies qui détériorent et causent d’énormes dégâts au milieu naturel. Sans parler de l’importance de sauvegarder une culture authentique, comme d’autres sur cette planète, pour ne pas perdre définitivement ce qui nous relie à notre Mère Nature. Il s’agit bien sûr d’un vaste débat que je ne prétends pas maitriser, mais que je souhaitais tout simplement présenter sous un autre jour, après ce voyage et les contacts que j’ai eus.

De retour au lodge je fais connaissance des autres pensionnaires, deux ouvriers spécialisés dans la construction, qui sont là pour plusieurs semaines à des conditions de salaire particulièrement avantageuses, ainsi que deux sympathiques jeunes femmes, respectivement de 22 et 29 ans, Jessica et Emy, dont la première est assistante dentaire et la seconde dentiste. Elles sont basées à Inuvik et se déplacent en avion pour faire 500 à 1'000 km, parfois dans des conditions extrêmes, pour soigner les gens qui vivent dans les localités éloignées, comme Sachs Harbour. Le lendemain, en allant découvrir la localité, je me rends au centre de Parcs Canada, pour plus d’informations sur la région, ce qui me permet de faire connaissance d’une descendante et sa fille de Vilhjalmur Stefanson, un fameux explorateur des années 1900, passablement contesté au Canada et qui a écrit de très nombreux ouvrages sur sa vie avec les inuit. De façon assez amusante la mère me précise que son ancêtre venait de Suisse, confondant notre pays avec l’Islande ! Le 2 avril je quitte l’île en fin d’après midi. Jackie Kuptana me mène au petit aérodrome, où elle se charge encore de l’enregistrement et c’est avec 6 autres passagers que je vais faire le vol retour sur Inuvik. Nous volons à basse altitude ce qui me donne tout le plaisir d’admirer quelques orignaux et une nature sauvage éclatante.

Arrivé à Inuvik, Judi m’explique que le B+B est complet et me propose de rejoindre en raquettes leur « out post cabin » à une heure de marche depuis la Dempster Highway. L’endroit est fantastique, complètement isolé et nous passons une excellente soirée et nuit. Le jour suivant sera consacré aux rétablissements, confortablement installé pour une nouvelle nuit à l’hôtel cette fois ci. Le 4 avril c’est la Fête du Muskrat, il fait assez froid (-25) et je vais filmer la course en chiens de traineaux ainsi que celle de skidoo. De la folie dans les deux cas. Les chiens, qui semblent assez féroces, sont des croisements pour favoriser la vitesse et les motos neige, des engins redoutables. Pour les chiens je vais pouvoir faire la différence car le jour d’après je filme, juché sur une remorque tirée par la moto neige d’Olav, le parcours habituel, ce qui me permet d’admirer ces huskies, pure race dans leurs élans.

Le 6 avril nous partons en expédition avec trois autres participants, Steve, un géo biologiste, reconnu pour ces travaux sur le pergélisol, Sarah Marie sa compagne, qui enseigne la survie dans le froid et Fred, un fonctionnaire des douanes canadiennes. Après une petite heure sur la route de glace, nous débarquons les cinq motos neige de la remorque pour parcourir 50 km environ, aller et retour, pour aller observer, dans une nature grandiose, un troupeau de plus de 2'000 rennes.











Ces animaux ont été amenés dans cette région pour la première fois en 1930, depuis l’Alaska, un voyage qui a pris cinq ans, pour combler la diminution du nombre de caribous et des problèmes de nourriture pour les autochtones. Nous demeurons sur place, avec le gardien du troupeau durant deux bonnes heures, ce qui m’offre tout le loisir de les observer avec beaucoup d’émotion, de les photographier et filmer.

Le lendemain je repars avec le sympathique couple pour faire 750 km environ sur la fameuse Dempster Highway et nous nous rendons jusqu’au cercle arctique, au sud d’Inuvik à quelques 370 km. Il s’agit d’une route spectaculaire, la plus haute géographiquement du Canada, qui relie Dawson City à Inuvik.

Enfin le 10 avril je m’envole à destination de Yellowknife, la capitale des Territoires du Nord et du diamant pour le Canada, 19'000 habitants, où je vais passer cinq jours pour un contact important en relation avec un projet, qui fera peut-être l'objet d'un prochain article. Et le 17 avril je vais rejoindre Geneviève et Elsa à Tokyo. Pour illustrer ce voyage, j’ai essayé de sélectionner quelques photos qui sont rassemblées dans l’album No 48, pour celles et ceux qui ont encore un peu de patience.

 

 

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